Nature humaine
EAN : 9782081433489
400 pages
Éditeur : FLAMMARION (19/08/2020)
4ème de couverture :
La France est noyée sous une tempête diluvienne qui lui donne des airs, en ce dernier jour de 1999, de fin du monde. Alexandre, reclus dans sa ferme du Lot où il a grandi avec ses trois sœurs, semble redouter davantage l’arrivée des gendarmes. Seul dans la nuit noire, il va revivre la fin d’un autre monde, les derniers jours de cette vie paysanne et en retrait qui lui paraissait immuable enfant. Entre l’homme et la nature, la relation n’a cessé de se tendre. À qui la faute ?
Extraits :
“Le progrès, c'est comme une machine, ça nous broie.”
“Chaque vie se tient à l'écart de ce qu'elle aurait pu être. À peu de chose près, tout aurait pu se jouer autrement.”
“Tu sais, gamin, dans la vie, quand on regarde trop loin y a trop de choses qui nous dépassent, et faire de la politique, c'est apprendre à ne plus penser par soi-même, tu piges ?”
“Pierrot était un vrai poète, un bon paysan, mais un paysan qui ne mettait jamais le réveil et était souvent en retard sur le soleil.”
“La nature est un équilibre qui ne se décide pas, qui s'offre ou se refuse, en fonction des années.”
“L'histoire se fait au plus près des êtres, elle influence les vies comme les mains modifient l'argile.”
Mon avis :
Une histoire complexe ou plutôt plusieurs histoires en une. Il y a celle d’Alexandre, fils de fermiers dans le lot, qui va devoir reprendre la ferme de ses parents, ses trois sœurs préfèrant l’appel de la ville, de la modernité. Il y a celle de l’époque, la sécheresse en 1976, fin des années Giscard, des premières grandes surfaces et des activistes qui œuvrent contre les centrales nucléaires. Il y a celle de Constanze, grand amour d’Alexandre, qui veut réparer la planète. Et surtout l’avancée de notre monde sur deux décennies, les campagnes sacrifiées par notre désir de nous déplacer vite, toujours plus vite et de manger sans dépenser trop et de posséder tout le confort moderne avec la fée électricité. Ce versant de l’histoire est vertigineux. J’ai trouvé le côté politique et activiste moins intéressant, quand je lis du Joncour j’aime surtout découvrir les gens et leur façon de vivre dans leur monde. J’ai adoré cette famille paysanne qui essaie de composer avec le progrès et leur mode de vie et la question de l’héritage car si les sœurs d’Alexandre préfèrent une vie confortable à la ville, elles demanderont très vite leur part d’héritage forçant Alexandre à faire des choix ne lui convenant pas. L’histoire d’amour magnifique entre Constanze et Alexandre mais à distance car Constanze, libre comme l’air, parcourt le monde et choisit de vivre en Inde et Alexandre lié à sa terre ne peut la suivre.
J’ai eu du mal à rentrer dans l’histoire, déroutée par ce changement de style de l’auteur qui nous emporte dans l’évolution de la société et du monde rural sur une vingtaine d’années, sur ce combat de jeunes adultes clairvoyants, certes, mais obligés de combattre dans la violence des explosifs.
Mais l’épilogue est mon passage préféré avec ces tempêtes de 1999, qui ravagent tout sur leurs passages, privant les habitants de l’électricité et du coup de ce monde moderne. Et qui s’en sort mieux ? Ceux qui ont encore des cheminées ou des poêles, des maisons solides, des postes à piles, des bougies, bref les gens de la campagne.
Je ne me rendais pas compte de la vitesse de l’évolution de cette modernité, peut-être parce que j’ai toujours un pied à la campagne, un pied en ville et que mon cheminement est plus lent. Je garde en tête depuis la fin de cette lecture, l’évolution du téléphone. Je me souviens parfaitement de celui de mon enfance, à cadran, sonnerie stridente, toujours installé dans une pièce de passage. Maintenant j’ai un portable que j’oublie dans un coin d’une pièce ou au fond d’un sac, systématiquement, privant mes proches d’une discussion, d’une info, d’un service, parce que je ne veux pas être esclave de cet objet que je ne pourrais pas recharger sans l’électricité. Objet réduisant les travailleurs, surtout en ce moment, en esclaves virtuels.
Une histoire perturbante mais salutaire à qui veut bien arrêter sa course folle de la vie moderne.