Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
la vie de ma voix intérieure
Newsletter
Archives
la vie de ma voix intérieure
  • Certains humains sont plus doués que d’autres. Certains sont faits pour accomplir. D’autres pour détruire. D’autres pour sauver. Mais la plupart des humains ne sont pas faits pour quoi que ce soit. Thomas Vinau
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
24 juillet 2022

Canicule. Chicago, été 1995 : autopsie sociale d'une catastrophe

 

 

Canicule, Chicago, été 1995 par Klinenberg

Eric Klinenberg

Marc Saint-Upéry (Traducteur)

EAN : 9782919380435

415 pages

COÉDITION ÉDITIONS DEUX-CENT-CINQ/ECOLE URBAINE (03/01/2022)




4ème de couverture :

Jeudi 13 juillet 1995, les habitants de Chicago se réveillent, une journée torride commence, au cours de laquelle la température va atteindre 41 degrés. La vague de chaleur s'étendra bien au-delà des deux jours initialement annoncés par les météorologues. Au cours de la semaine qui suit, plus de sept cents personnes vont périr. La grande vague de chaleur de Chicago est l'une des plus meurtrières de l'histoire américaine. Eric Klinenberg entreprend l'autopsie sociale" d'une métropole, examinant les organes sociaux, politiques et institutionnels de la ville. Il y étudie les raisons de la surmortalité marquée dans certains quartiers, examine comment la municipalité a réagi à la crise et comment les journalistes, les scientifiques et les fonctionnaires ont rapporté et expliqué ces événements. Combinant des années de travail sur le terrain, des entretiens approfondis et des recherches d'archives, l'auteur découvre qu'un certain nombre de formes surprenantes et inquiétantes de rupture sociale ont contribué aux taux élevés de mortalité. Ce compte rendu incisif et saisissant de la condition urbaine contemporaine révèle les fissures de plus en plus importantes dans les fondations sociales des villes américaines. Les dynamiques qui ont affecté Chicago de manière si désastreuse perdurent et nous ne pouvons continuer de les ignorer, affirme Eric Klinenberg.

 

Extraits :

 

“ Le changement climatique a déjà engendré un certain degré de violence et d’instabilité affectant la vie sur terre. “

 

“ Les canicules sont des assassins silencieux et invisibles, dont les victimes sont elles aussi silencieuses et invisibles, et nous les ignorons à nos risques et périls. “

 

“ Reste qu’en dernière analyse,il est vain de subordonner l’enquête sur la vague de chaleur à la recherche d’un coupable, car seule une analyse grossière peut réduire un événement aussi complexe aux agissements d’un seul acteur, d’un unique agent causal ou d’une seule force sociale. “

 

“ En l’absence de voies publiques donnant envie aux gens de sortir de chez eux, les habitants des quartiers urbains ont plus de risques de souffrir d’isolement et de distance sociale. “

 

“ En matière de production collective de l’isolement, il existe d’autres facteurs que nous n’avons pas pu explorer pour l’instant. Après avoir analyser les tendances démographiques, les évolutions culturelles, les conditions de logement et les caractéristiques de genre qui permettent d’expliquer le décès de certaines personnes pendant la canicule, nous pouvons maintenant nous pencher sur la question de savoir s’il existe au niveau de la communauté ou du quartier des conditions plus générale contribuant à la plus ou moins grande vulnérabilité des citadins. “

 

“ La campagne de relations publiques de la mairie  n’a donc pas seulement influencé la perception de la canicule par le public, elle a aussi altéré la capacité organisationnelles des autorités  locales à affronter  les risques sanitaires croissants  en encourageant ou en imposant  une forme de déni bureaucratique  aux administrations qui auraient pu  autrement mobiliser  une réponse efficace. “

 

Mon avis :

Pourtant, le mercredi 12 juillet 1995, le Chicago Sun-Times annonçait une vague de chaleur potentiellement meurtrière se dirigeant vers la ville. Les prévisions étaient en-deçà de la réalité. Le jeudi la température était de 41 degrés, l’indice de chaleur était de 52 degrés.  Il faisait 49 degrés à l’intérieur des immeubles, les voitures tombaient en panne en pleine circulation, les enfants, dans les cars scolaires, étaient victimes de coups de chaleur. Il y eut des coupures d’électricité en raison de la surconsommation d’électricité. Sans lumière, sans air conditionné, sans radio et sans télévision, les habitants n'accédaient plus aux infos et conseils sanitaires, les ascenseurs étaient en panne et les pompiers allaient secourir les personnes âgées coincées dans leurs appartements.

Dans les quartiers populaires, les jeunes ouvrirent les bouches d’incendie pour se rafraîchir, privant les habitants d’eau courante.

Le vendredi 14 juillet, pour la troisième journée de cette canicule, la température ne baissait plus, même la nuit. Le 19 juillet, le nombre de victimes de stress thermique explosa. Aucune ambulance n’était disponible. Les gens devaient se débrouiller par eux-mêmes.

Cette vague de chaleur devint une vague de mortalité avec plus de 700 morts. La municipalité fut dépassée, la police entassait les corps un peu partout. Il arrivait que les corps soient déjà en décomposition car les gens n’avaient pas été secourus à temps.

Un film d’horreur qui devenait réalité.  L’auteur, originaire de la ville, décida de réaliser une enquête sur la canicule et la façon dont cette catastrophe fut gérée, non pas pour accuser, plutôt pour en tirer des leçons pour l’avenir. Une véritable dissection sur sa ville, ses habitants, les différents quartiers et selon ces derniers la possibilité des personnes de s’en sortir. 

Deux constats : malgré la misère et deux quartiers identiques, il y avait plus de morts dans le quartier afro-américain que dans le quartier hispanique. Les personnes âgées, isolées et les malades avaient peu de chance de s’en sortir avec la politique de la ville à cette époque qui favorisait la mixité dans les cités sociales. Ainsi les personnes âgées vivaient dans la terreur des gangs, n’ouvraient plus leur porte et refusaient de sortir.

Évidemment, une fois la crise passée, il fallait des responsables. Le maire et son équipe accusa le fournisseur d’énergie, des rapports officiels critiquaient les médias, le Chicago Sun-Times accusait  les autorités municipales d’avoir ignoré les plans d’urgence, les agents du service public reprochaient aux familles des victimes de ne pas s’être occupés de leurs proches et le responsable du Département déclara publiquement que les gens étaient morts à cause de leur négligence.

L’auteur a essayé d’écrire des chapitres selon une problématique mais, dans ce récit, les difficultés et responsabilités se chevauchent, se croisent, sont liées.

Une enquête passionnante, prenante et forcément j’ai fait une comparaison avec cette vague de chaleur de cet été en France, puisque presque les mêmes dates. La façon dont les municipalités et les départements gèrent l’assistance aux personnes vulnérables, le ressenti des gens. Il y a toujours une histoire politique, des élus qui se donnent corps et âmes pour leurs administrés, qui croient à l’entraide et qui montrent l’exemple et les autres, des agents du service publique engagés dans leur mission et les autres.

Si je dois garder un souvenir de cette étude, ce sera l’histoire de Pauline, très âgée, vivant seule mais gardant contact avec ses amies par téléphone. Pauline vit au deuxième étage d’une résidence et se déplacer lui prend beaucoup de temps. Elle écoute les infos et décide de suivre les conseils donnés de sortir tôt le matin. Le lendemain matin, elle se prépare, descend difficilement les escaliers, va au bout de la rue pour prendre le bus et se rend dans un magasin d’alimentation bénéficiant d’un climatiseur, puis repart, reprend le bus, remonte les escaliers et arrive chez elle avec un coup de chaud. Se voyant en difficulté, elle appelle une amie et lui demande de rester au téléphone. Elle va chercher des serviettes de bain qu’elle mouille, étale sur son lit et s’allonge dessus. Après de longues minutes, la température de son corps descend, elle se sent mieux et va prévenir son amie qui était restée en ligne.

Je pourrais noircir des pages et des pages sur ce livre,  vous parler du dérèglement climatique, de cette politique privilégiant la responsabilité individuelle, du manque de solidarité, des services sociaux orientant les usagers vers des associations qui font ce qu’elles peuvent, des statistiques sur les problèmes humains que ce soit dans le social ou le médical, je vais m’arrêter là. Bonne lecture.


Je remercie Masse critique de Babelio et Les 
Éditions 205 pour cette découverte passionnante.




Publicité
Publicité
Commentaires
P
Un p'tit coucou Corinne,<br /> <br /> Merci d'avoir attiré notre attention sur cette "autopsie sociale" et aussi pour les extraits et ton ressenti. Brave Pauline ... un exemple à suivre et un titre à noter !<br /> <br /> Gros bisous et bon courage à toi.
Répondre
la vie de ma voix intérieure
Publicité
Derniers commentaires
Albums Photos
Publicité