Les loyautés
ISBN : 2709661586
Éditeur : J.-C. LATTÈS (03/01/2018)
4ème de couverture :
Chacun de nous abrite-t-il quelque chose innommable susceptible de se révéler un jour, comme une encre sale, antipathique, se révèlerait sous la chaleur de la flamme ? Chacun de nous dissimule-t-il en lui même ce démon silencieux capable de mener, pendant des années, une existence de dupe ?
Extraits :
"C'est étrange, d'ailleurs, cette sensation d'apaisement lorsque enfin émerge ce que l'on refusait de voir mais que l'on savait là, enseveli pas très loin, cette sensation de soulagement quand se confirme le pire."
"C'était une femme que la vie n'avait pas épargnée. Une femme dont le rêve avait été piétiné et qui tentait de faire bonne figure."
"Je sais que les enfants protègent leurs parents et quel pacte de silence les conduits parfois jusqu'à la mort."
"Mon imposture est à l'origine du désastre."
Mon avis :
Hélène est enseignante. Attentive aux autres, une dose élevée d’empathie. Enfant maltraitée violemment par son père, sa mère a préféré ne rien voir. Une survivante Hélène.
Alors quand elle croise les yeux de Théo, son élève, elle voit, elle sait, la souffrance est là, invisible aux yeux des autres.
Théo est fils de divorcés. Un père qui a trompé sa mère puis s’est retrouvé seul, sans travail, sans allocations. Alors loin de toutes responsabilités, il se laisse mourir, gavé d'antidépresseurs, ne se levant que rarement, ne se lavant plus. Théo vit avec son père une semaine sur deux. Garde partagée. Théo est le père de son père. Quand il rentre chez sa mère, il doit se déshabiller entièrement et se laver. Il doit éviter de croiser le chemin de sa mère dans l’appartement, éviter de ressembler à son père, d’en parler. Sa mère lui en veut, d’exister, d’être là. C’est une femme usée et aigrie.
Alors Théo boit, s’enivre même dans les couloirs du collège. Le but est de boire assez pour ne plus être là, de ne plus avoir conscience de ce qu’il se passe autour de lui, dans sa vie.
Il entraîne Mathis son meilleur ami. Une vie plus stable que celle de Théo mais une mère qui a du mal à s’assumer, soumise à son mari et qui vient de faire une terrible découverte. Elle voit bien que Mathis ne va pas bien mais elle n’arrive pas à réagir.
Les personnages sont en place. Hélène fera ce qu’elle peut et plus encore pour alerter, Théo fera ce qu’il peut et plus pour ne plus penser. Ils sont face à l’indifférence des adultes, des normaux, de ceux qui attendent les drames pour voir.
Delphine De vigan jongle avec les mots, percute nos sentiments, nous met en face de notre lâcheté. Elle égratigne la famille, le couple, le système scolaire. Une lecture rapide qu’on n’oublie pas de sitôt.