Americanah
Traductrice : Anne Damour
EAN : 9782070142354
528 pages
Éditeur : GALLIMARD (31/12/2014)
4ème de couverture :
“En descendant de l’avion à Lagos, j’ai eu l’impression d’avoir cessé d’être noire.”
Ifemelu quitte le Nigéria pour aller faire ses études à Philadelphie. Elle laisse derrière elle son grand amour, Obinze, éternel admirateur de l’Amérique, qui compte bien la rejoindre. Mais comment rester soi lorsqu’on change de pays, et lorsque la couleur de votre peau prend un sens et une importance que vous ne lui aviez jamais donnés ?
Extraits :
“Elle aimait par-dessus tout pouvoir prétendre, dans ce lieu où régnait l’abondance, être quelqu’un d’autre, admis par faveur dans le club consacré de l’Amérique, quelqu’un auréolé d’assurance.”
“Elle regardait les photos de ces hommes et de ces femmes et ressentait la sourde douleur d’une perte, comme s’ils avaient ouvert sa main de force et pris quelque chose qui lui appartenait. Ils vivaient sa vie.”
“Comment pouvait-on regretter quelque chose dont on ne voulait plus ?”
“C’était le genre de femme qui pouvait sans peine amener un homme à abandonner ses racines, le genre de femme qui, parce qu’elle n’attendait ni exigeait aucune certitude, rendait possible une certaine forme d’assurance.”
“Une tristesse nouvelle le submergea, la tristesse des jours qui l’attendaient quand il aurait l’impression que le monde était légèrement détraqué, que sa vision était floue.”
“Il y avait un truc qui ne tournait pas rond chez elle. Elle ne savait pas quoi, mais quelque chose clochait. Une avidité, une impatience. Une connaissance imparfaite d'elle-même. Le sentiment qu’il existait un ailleurs, hors de sa portée.”
“C’était ça l’amour, l’impatience du lendemain. “
Mon avis :
Ifemelu ne serait peut-être jamais partie étudier aux États-Unis sans les grèves et les manifestations qui paralysaient son pays, le Nigéria. Plus d’essence pour les voitures, plus de pension pour les retraités et les enseignants qui manifestent. Poussée par son amoureux Obinze qui devait la rejoindre plus tard et rassurée par la présence de sa tante là-bas, pour un accueil familial, Ifemelu quitte le Nigéria.
À son arrivée, elle a une succession de chocs. Celui du climat, celui de la précarité, de l'apparence et de la différence.
Ifemelu découvre pour la première fois qu’elle est noire. Se découvrir dans les yeux des autres est une chose terrible quand on n’en a pas la perception.
Elle découvre et nous fait découvrir les États-unis avec son regard d’immigrée, cherchant, en vain, la solidarité entre exilés, sa tante ne peut l’héberger que pour une courte période avant son entrée à l’université. Elle nous raconte son enfance, les croyances de sa mère, la dépression de son père mais une vie assez confortable.
Obinze n’obtiendra jamais son visa pour les Etats-Unis et devra se contenter de l'Angleterre dont il se fera expulser, ramené au pays par des policiers. Il y vivra également le manque de solidarité et une succession de petits boulots, la précarité. Au pays, tout le monde se moque de ceux qui partent à l’étranger pour nettoyer les toilettes.
Ifemelu ne donnera plus de nouvelles à Obinze après une situation traumatisante. Lui continuera à envoyer des mails année après année, puis se mariera avec une autre.
Cette jeune femme ne lâchera rien. Elle crée un blog pour décrire sa situation de femme noire puis les réactions des américains face aux étrangers. Au moment où elle s’y attend le moins, le blog prend de l’ampleur et lui permet enfin de vivre décemment. Deux compagnons plus tard, elle décide de rentrer au pays.
Et d’étrangère dans un pays étranger elle devient étrangère dans son propre pays. Elle doit retrouver sa place et peut être Obinze.
J’ai aimé suivre la vie d’Ifemelu qui est une femme avec une forte personnalité. Toutefois je l’ai trouvée assez intransigeante avec Obinze. Je me demande si inconsciemment elle ne lui en voulait pas de tout ce qu’elle a vécu loin de lui.
Je pense ne vous avoir dévoilé que le quart, et encore, de l’histoire. De nombreux personnages, d’interminables détails jalonnent ce livre passionnant. Il faut être concentré et j’avoue que je regardais de temps en temps le nombre de pages restantes.